Emission GRAND BIEN VOUS FASSE! du 01 Janvier 2024 par Ali Rebeihi: L’optimisme est bon sur notre santé physique et psychique.
Avec
- Philippe Gabilliet Docteur es Sciences de gestion , consultant en management
- Florence Servan-Schreiber Journaliste, écrivain
- Christophe André Psychiatre et psychothérapeute
Est-il raisonnable d’être optimiste en ce début d’année 2024 ? Est-ce faire preuve d’inconscience ou de déni de réalité ? L’optimisme reste encore très souvent moqué. Souvenons-nous du personnage de Pangloss dans Candide, et de sa devise « Dans le meilleur des mondes possibles, les choses ne peuvent être autrement ». Allusion moqueuse à la philosophie de Leibniz, pour qui les hommes vivaient dans le meilleur des mondes possibles.
Terrorisme, réchauffement climatique, inflation, Ukraine, guerre Israël/Hamas… Comment rester optimiste, alors que l’actualité est très anxiogène ? Ce bon vieux Shopenhauer a-t-il raison quand il affirme « aujourd’hui est mauvais et chaque jour sera plus mauvais, jusqu’à ce que le pire arrive ».
En d’autres temps, le réalisateur de Certains l’aiment chaud, Billy Wilder, faisait remarquer que ses « amis optimistes avaient fini à Auschwitz, tandis que les pessimistes dans son genre avait tout réussi à Hollywood ».
Une étude de la Société américaine de gériatrie menée pendant 25 ans, sur 160 000 femmes âgées de 50 à 80 ans, a mis en évidence que les personnes les plus optimistes vivaient en moyenne quatre ans de plus que les autres. Une méta analyse portant sur 230 000 personnes, a démontré que l’optimisme est associé à une diminution significative du risque cardio vasculaire. Nous le savons aujourd’hui, les bienfaits de l’optimisme sur notre santé physique et mentale sont indéniables. Les Français semblent être, pourtant les champions de l’insatisfaction chronique. Philippe Gabilliet, Professeur à l’ESCP Europe, l’explique par l’enseignement de l’esprit critique fortement ancré à la culture française « Depuis plus d’un siècle et demi, le marqueur numéro un de l’intelligence, reste le doute, le scepticisme. Admirer, faire acte d’admiration, reste quand même quelque chose d’un peu risqué ». Peut-on raisonnablement être français et optimiste ? Comment cultiver l’optimisme ?
Qu’est-ce qu’être optimiste ?
Churchill disait « un pessimiste voit la difficulté dans chaque opportunité, un optimiste voit l’opportunité dans chaque difficulté ». Existerait-il deux clans ? D’un côté les optimistes, de l’autre les pessimistes.
Pour Philippe Gabilliet, auteur d’Eloge de l’optimisme, on ne peut les opposer « Dès la naissance, l’optimisme et le pessimisme ont été installés d’office par le génome. Et c’est vrai qu’après, la vie nous a peut être plutôt paramétrés d’un côté ou de l’autre. En revanche, il est clair que l’optimisme reste encore aujourd’hui, une énergie plutôt orientée sur la confiance, la mise en action des autres, l’envie, le désir. Et le pessimisme est une très belle énergie de régulation, d’alerte ». S’il devait définir l’optimisme « ce serait de prendre la réalité telle qu’elle est, en la mettant sous la tension la plus positive possible. La question fondamentale de l’optimisme, c’est la question de l’optimisation. Quand il m’arrive des choses terribles, la vraie question c’est ‘qu’est-ce que je vais pouvoir essayer d’en faire ?’ »
Florence Servan-Schreiber, auteur de La Fabrique à kifs voit dans l’optimisme, la possibilité de rassembler son courage pour se remettre en selle en dépit des revers et des échecs rencontrés dans l’existence. Son portrait-robot de l’optimiste serait « si quelque chose se passe bien, je vais généraliser en disant c’est super, ça se passe bien. Mais si à l’inverse, cela ne se passe pas bien, je vais chercher dans ce qui s’est produit ce qui s’est quand même bien passé et ça me permettra de retourner au combat parce que sinon, c’est totalement désespérant de se dire que les choses sont incontrôlables et que je ne vais pas pouvoir les dominer ».
Christophe André, psychiatre explique, qu’il a été démontré en médecine, que les pessimistes se soignaient moins bien que les optimistes, précisément parce que ce qui caractérise l’optimiste, c’est son engagement dans l’action : « Les optimistes voient les problèmes, cherchent les solutions et ils s’engagent dans l’action pour que cette solution advienne. Et donc par exemple, si j’apprends que j’ai une maladie et que je suis optimiste, je vais m’engager dans des modifications : de mon style de vie, dans le traitement, dans le dialogue avec les médecins. Si je suis pessimiste, je vais me laisser aller et je vais peut-être faire moins d’efforts ».
Des prédispositions à être optimiste ?
Comment expliquer que certains d’entre nous soient optimistes et d’autres non. Existe-t-il un gêne de l’optimisme ? Christophe André, explique « Il y a des influences biologiques et sans doute génétiques, mais pas sur l’optimisme et le pessimisme, plutôt sur la tonalité émotionnelle de base. Nous savons qu’il y a certains d’entre nous qui ont la chance d’être plutôt détendus, tranquilles, aptes au bonheur, même quand il n’y a pas de raison extraordinaire de se réjouir. Et d’autres, c’est l’inverse, ils sont plutôt fragiles, grognant émotionnellement. Et les optimistes se recrutent plutôt chez les gens qui ont des bonnes prédispositions émotionnelles ». Pour autant, le psychiatre précise que l’on peut apprendre à le devenir : en faisant évoluer sa vision du monde, en s’entraînant à réorienter régulièrement son regard. Celui-ci souligne que les pessimistes sont des gens qui font sans arrêt des prédictions aux scénarii catastrophe et qu’ils se trompent finalement presque tout le temps.
Ses nombreux bienfaits sur notre santé
L’optimisme entraîne un certains nombre d’effets positifs pour notre santé. Christophe André, en répertorie 3 principaux :
- Emotions agréables
« Quand on est fréquemment optimiste, on ressent des émotions agréables. On est le plus souvent confiant, admiratif, enjoué, dans la reconnaissance, la gratitude. Ces émotions activent le parasympathique, elles font sécréter à notre corps tout un tas de substances, de neurotransmetteurs qui vont dans le sens d’un renforcement de notre immunité ». - Engagements dans l’action
« Si j’apprends que j’ai une maladie sévère, mais que j’ai un tempérament ou que j’ai appris à être optimiste, je vais m’engager pour aller mieux, pour protéger ma santé. Je vais avoir des comportements adaptés, favorables à ma santé. On sait qu’il y a une partie de notre santé qu’on appelle la santé active, qui répond à l’exercice physique, à une alimentation adaptée ». - Lien social
« Un optimiste est quelqu’un que l’on a davantage plaisir à fréquenter. Le lien social, le fait d’avoir des relations sociales épanouissantes est également très bon pour la santé comme le montrent les études.
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